Actualité - Visite guidée de l'Oppidum de Jastres le dimanche 15 juin à 15h00
Quand on pose à un Ardéchois la question : “Y a-t-il des dolmens à Lussas ?”, généralement la réponse fuse : “le dolmen des Quatre Pierres à Mias”, parfois les habitants en citent quelques autres dans leur voisinage et, sauf pour une poignée d’amateurs cela ne dépasse jamais la dizaine. La surprise est grande d’apprendre qu’il y a 36 dolmens visibles sur l’ensemble du territoire communal. Tous sont répertoriés dans les fiches d’inventaires déposées à la Cité de la Préhistoire d’Orgnac.
Lussas est situé à l’extrême pointe nord de la zone triangulaire d’implantation des quelques 900 dolmens ardéchois, en limite du plateau des Gras. Aucun mégalithe n’est présent dans la partie Est de la commune, zone fertile peu propice à la construction des dolmens, qui aurait nécessité le transport de blocs rocheux.
En 2019, soucieuse de préserver ce patrimoine archéologique de valeur, la municipalité a mis en place avec le soutien de Sonia Stocchetti3 un projet d’actualisation des fiches d’inventaire et de préservation des dolmens.
π- Localiser précisément les dolmens Lussassois
La première phase a consisté à localiser chaque dolmen car les coordonnées mentionnées par les archéologues sur les fiches d’inventaire étaient délibérément approximatives… pour déjouer les fouilleurs “sauvages” avides de possibles offrandes encore enfouies.
Il est à préciser que nul ne peut fouiller, modifier, dégrader ou détruire des vestiges mégalithiques car il est important de les laisser intacts en vue d’éventuelles nouvelles recherches. Ceci permet aux archéologues de dater les trouvailles au fil des niveaux explorés (stratigraphie). La recherche des localisations exactes s’est faite avec l’appui de deux grands connaisseurs locaux du sujet : Gérard Boyrel et Stéphane Aubert, et de Gary Duchez, prospecteur de dolmens agréé par le SRA4 que nous remercions vivement. Au final, tous les dolmens ont été retrouvés malgré des écarts moyens de position de 153 m (maximum de 450 m).
Ces nouvelles coordonnées seront prochainement communiquées au cadastre afin de prévenir d’éventuelles dégradation par méconnaissance du positionnement des mégalithes.
π- Une vénérable population
De type Caussenard, comme la grande majorité des dolmens ardéchois, les dolmens lussassois sont âgés de 4500 à 3800 ans AP5. Certains ont été réutilisés jusqu’à l’âge du fer (2800 AP). Sur l’ensemble, seuls quatorze présentent une chambre sépulcrale discernable, 12 ont des éléments encore en place (montant(s) et/ou chevet) les autres sont identifiés grâce à des vestiges épars ou par les restes de tumulus..
Parmi eux, cinq ont été fouillés par l’archéologue Henri Saumade entre 1969 et 1991. Le mobilier des fouilles est conservé à la Cité de la Préhistoire d’Orgnac qui en expose certaines pièces.
Quelques dolmens Lussassois caractéristiques :
Dolmen des Quatre Pierres à Mias - avec sa table en équilibre reposant sur un seul montant et le chevet.
Dolmen emmuré à Mias.
Les dolmens des Rieux 2 et 3 - documenté par le rapport de fouille.
Dolmen de Bois Vignasse - dont la nature et l’authenticité posent question.
Dolmen de l’Issart (proche de Jastres Nord) - documenté par son rapport de fouille.
- Les dolmens1 par Alain Claudin2, le 14 mars 2021 -
1 Voir encadré :”Qu’est qu’un dolmen Lussassois”.
2 Alain Claudin est retraité. Avec son épouse, également retraitée, ils sont implantés depuis onze ans à Lussas. Amateurs d’archéologie, ils sont en charge de la mission d’inventaire des dolmens lussassois.
3 Chargée de mission dolmens à la Cité dela Préhistoire d’Orgnac, chef de projet “Chemins & Dolmens”.
4 SRA : Service Régional de l’Archéologie.
5 AP : avant le présent.
π- Et maintenant…
La prochaine étape va consister en l’actualisation de la description fine de chacun des dolmens et à identifier d’éventuelles dégradations ou risques de dégradations par comparaison avec les fiches d’inventaire originales.
La description fine consiste à mesurer chaque élément du dolmen dans les trois dimensions, y compris le tumulus, à photographier prise les détails significatifs, à donner vues d’ensemble (un pilote de drone expérimenté serait d’un grand secours pour cela) et, en fin, rédiger le compte-rendu de complément de fiche d’inventaire.
Dans le même temps, il serait intéressant de commencer à nettoyer régulièrement les broussailles et les déchets de chaque dolmen pour faciliter l’observation à intervalles réguliers de leur état.
Comme on le devine, il y a largement de quoi être occupé sur une longue période. Nous serions très heureux de partager notre connaissance des dolmens et ce gros chantier avec les Lussassois que l’aventure tenterait.Toutes les bonnes volontés sont les bienvenues.
Tous les dolmens découverts à Lussas se trouvent dans la zone des Gras. La difficulté à pénétrer cette vaste zone ne favorise pas la recherche de nouveaux dolmens, mais laisse planer l’idée qu’il pourrait en rester quelques uns à découvrir…
En conclusion, les Lussassois possèdent un patrimoine archéologique important qui mérite d’être mieux connu et surtout protégé. N’hésitez pas à nous contacter au pour parler plus en détail des dolmens et des travaux à réaliser.
Encadré : Qu’est-ce qu’un dolmen Lussassois ?
Les dolmens (table de pierre en breton) lussassois sont des monuments funéraires collectifs construits dans les calcaires durs du jurassique supérieur du plateau des Gras. Ils sont constitués d’une chambre encadrée par deux plaques de pierre verticales parallèles, les montants. Ceux-ci prennent appui de part et d’autre sur une autre plaque perpendiculaire de même nature appelé chevet. L’ensemble est recouvert par une quatrième plaque de pierre, la table. La quatrième face, est celle de la fermeture par une plaque de plus faible dimension permettant l’entrée des défunts. Cette construction est recouverte de pierres, le tumulus. L’ensemble tumulus-dolmen, est également appelé dolmen.
Les calcaires de la zone des Gras ont la particularité de se déliter en plaques de quelques dizaines de centimètres d’épaisseur bien adaptés à la construction des dolmens. Au fil du temps, sous l’action de l'eau de pluie enrichie en dioxyde de carbone les plaques de calcaires se dégradent fortement surtout en cas d’absence de la table.